Si l’actualité du dialogue entre sciences, recherche et société est, ce mois-ci encore, riche de nouveaux dispositifs et d’initiatives inventives, elle illustre également un changement de paradigme. Sans retracer toute l’histoire de la culture scientifique, technique et industrielle, rappelons toutefois que celle-ci a longtemps été perçue comme un simple loisir pour enfant. Et qu’il faudra attendre l’aurore des années 80 avant que l’État ne s’en préoccupe sérieusement afin « de sortir la science de sa tour d’ivoire, de […] la dévoiler sur la place publique » pour reprendre les mots de Jean-Marc Lévy-Leblond.
Depuis la loi d'orientation et de programmation pour la recherche et le développement technologique de 1982 jusqu’au Plan national pour la diffusion de la culture scientifique, technique et industrielle de 2004, et même au-delà, cette première phase d’ouverture de la science vers la société poursuivra deux grandes ambitions. La première sera de donner aux plus jeunes goût et intérêt pour les sciences et techniques tout en espérant ainsi les attirer plus largement vers les carrières scientifiques. La seconde sera d’offrir à leurs parents les clés de compréhension d’un monde de plus en plus complexe sinon d’établir un lien de confiance entre la science, évidente source de progrès et de liberté, et la société, supposément irriguée de « peurs irrationnelles ».
Le basculement vers un « dialogue entre sciences, recherche et société » n’est pas qu’une coquetterie éditoriale. Il exprime l’impérieuse nécessité d’inventer de nouveaux espaces de porosité et lieux d’interface, de multiplier les opportunités d’interaction et d’échange dépassant la seule diffusion descendante des science « dures » dans la société. Il trace un triangle vertueux entre les sciences, corpus des savoirs scientifiques stabilisés, la recherche, processus de production de nouvelles connaissances ou applications, et la société, composées d’une pluralité de communautés d’individus (citoyens mais aussi décideurs publics, journalistes…). Il laisse entrevoir les diverses expressions que peut prendre ce dialogue, allant du partage d’une culture scientifique commune jusqu’à l’appui des chercheurs à la décision publique en passant par les différents degrés des sciences participatives ou les rivages de la science ouverte. Il invite enfin chacune et chacun à y participer, à titre individuel et collectif.
Pour illustrer cette diversité des appropriations et des pratiques, la rédaction de cet éditorial sera confiée chaque mois à une ou un acteur de ce changement.